Monsieur Gaby MALAHEL
Président du NTL
A PARIS, le 22 Mars 2012
Monsieur Dominique BAUDIS
Défenseur des droits
Je me rapproche de vous pour dénoncer les discriminations que subit la culture ultra-marine et plus particulièrement la musique, la littérature et la cuisine,
Une discrimination musicale ?
La présente requête part d’un constat simple : Dans les magasins de musique, les artistes antillais sont classés dans la rubrique « musique du monde ».
Nous nous sommes longuement interrogés sur cette classification et nous n’avons trouvé aucune justification à cette discrimination,
Ces artistes sont Français, chantent le plus souvent en Français, résident en France (Métropole / DOM – TOM) et paient leurs impôts en France,
Il pourrait nous être opposé que la musique ultramarine tel le zouk, a une « style » particulier non conforme à l’appellation « variété française »,
Cet argument serait recevable si on nous explique pourquoi Dany BRILLANT et ses albums d’inspiration sud américaine sont classés dans cette catégorie « variété française »
Il en est de même pour Serge GAINSBOURG et ses influences REGGAE, pour Bernard LAVILIIERS et son album SALSA, pour Michel FUGAIN et son titre « fait comme l’oiseau » (reprise d’un standard Brésilien), pour Patrick VASSILU et sa chanson « qui c’est celui là »
De la même manière, comment expliquer que la reprise du titre « Rosalie » interprété par CARLOS soit classé en « variété Française » alors que la version originale de Georges PLONQUTTE reste classée en « musique du monde »
Alors, qui classer en catégorie « variété française » ?
Il est certain que cette catégorie ne concerne pas que les Français chantant en français dans un style français (s’il en existe un) car nous trouvons dans cette catégorie :
- de nombreux artistes français chantant des reprises internationales comme Richard Antony, Eddy Mitchell, Hugues Auffray, Moustaki…..
- des artistes d’origines étrangères chantant en Français comme Céline Dion, Johnny Hallyday, Jacques Brel, Plastic Bertrand, Demis Roussos …..
Enfin, il est étonnant de voir que quelques rares artistes antillais ont droit à la classification « variété française » ; c’est notamment le cas d’Henry Salvador, de Laurent Voulzy : c’est donc possible !!!!!
La discrimination nous paraît donc clairement établie et entraîne les conséquences suivantes :
- Elle permet aux majors de produire des « tubes de l’été » aux sonorités Zouk qui bénéficieront du classement « variété Française » et donc d’une visibilité plus importante que les artistes antillais qui zoukent toute l’année. Ce fut notamment le cas du titre de Lorie « partie pour zouker » en 2006 qui fut vendu à plus de 100.000 exemplaires.
- Les « musiques du monde » sont le plus souvent classées au fond des magasins. Ce manque de visibilité entraîne nécessairement une perte de parts de marché.
Ce manque à gagner est difficile à chiffrer mais n’en demeure pas moins certain. Il serait intéressant d’interroger les spécialistes du marchandising à ce sujet.
Afin de remédier à cette injustice, il me paraît indispensable d’obliger les distributeurs tels que la FNAC, VIRGIN …. à intégrer les artistes ultra-marins dans la catégorie « variété Française »
La mise en place de panneaux d’affichage expliquant les modifications de classement me parait être une bonne idée pour « donner un coup de projecteur » sur cette musique riche et permettre au grand public de s’apercevoir que la musique antillaise était jusque là relayée au second plan.
Il sera également indispensable d’effectuer des contrôles pour vérifier que le nombre de références de musique antillaise reste constant dans le temps. En effet, il n’est pas question que cette nouvelle classification entraine une baisse du nombre d’album référencés dans les points de vente.
Par ailleurs, nous pouvons supposer que cette classification en musique du monde sème le trouble dans l’esprit des professionnels de la musique et notamment des programmateurs radios quant à la loi sur les quotas de diffusion de « Chansons d’expression française ».
Le changement de classification pourrait s’accompagner de la création d’un quota temporaire de diffusion de la musique antillaise afin de rétablir cette injustice.
La littérature ultra-marine
A cet égard, il est à noter, que le même problème se pose avec la littérature ultra-marine. Pourquoi est-elle séparée de la littérature française ? Le débat n’est pas nouveau. Mais cette lettre est l’occasion de reposer la question. Si vous cherchez un livre d’un auteur comme Maryse Condé dans une librairie parisienne, si vous avez un peu de chance, vous pouvez en trouver un dans un petit rayon, bien caché au fond de la librairie, classé avec d’autres auteurs ultramarins. Le classement peut aller de « Caraïbe », « littérature francophone », « Antilles », etc. Si les livres des auteurs ultramarins étaient classés en littérature française, il existerait un lectorat potentiel : possibilité de feuilleter le livre, au hasard de la recherche. Rassemblés à l’écart dans un petit coin d’une librairie, ces auteurs ultra-marins sont invisibles.
La classification, « littérature française » sortirait ces auteurs de cette zone floue, et élargirait le cercle de leurs lecteurs.
La cuisine antillaise est également « mise à l’écart »
Une discrimination culinaire ?
La plupart des ouvrages de cuisine relatifs à la cuisine française et à la cuisine régionale ne font aucune référence à la cuisine antillaise.
Cette absence nuit :
- à l’agriculture antillaise qui produit des ingrédients spécifiques à ces recettes et qui ne trouvent que peu d’acheteurs en métropole car peu de gens connaissent cette cuisine.
- Aux restaurateurs antillais car la présence de la cuisine antillaise dans les ouvrages de cuisine Française ferait connaître cette cuisine à un plus large public. Cette augmentation du volume d’amateur de cuisine antillaise devrait accroître la clientèle des restaurants antillais
Pour mieux vous rendre compte de cette discrimination, essayer de trouver de la poudre à COLOMBO dans un petit magasin de province : vous n’en trouverez pas pourtant vous trouverez facilement de la sauce SOJA…….
Il me parait nécessaire d’attirer l’attention des éditeurs sur cette discrimination et de leur demander d’intégrer des recettes antillaises dans leurs ouvrages de cuisine régionale.
Je vous remercie par avance de l’intérêt que vous porterez à cette requête,
Restant à votre disposition pour un entretien éventuel,
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments distingués,
Mr Gaby Malahel
Président de NTL
Les signataires